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BERTON, Henri-Montan. Traité d'harmonie suivi d'un dictionnaire des accords en trois volumes. Paris, Mme Duhan et Cie, [1814].




CEULEMANS (1990-1991) cite pour 1815 un Traité d'harmonie basé sur l'arbre généalogique, suivi d'un dictionnaire des accords, 4 vols, Paris, Schoenenberger, et mentionne aussi une édition du dictionnaire seul, s.d. Le Traité d'harmonie examiné ici constitue donc le premier volume. Une planche dépliante en début du volume donne une description de l'arbre généalogique, dont la « Racine ou corps sonore harmonique » est la fondamentale accompagnée de sa 12e (harmonique 3) et de sa 17e (harmonique 5). Les trois branches de l'arbre donnent comme accords fondamentaux respectivement l'accord parfait, celui de 7e et celui de 9e, ainsi que les mêmes avec retard de la 3e; dans le cas de l'accord parfait, le retard de l'8e est envisagé aussi, ainsi que le double retard de la 3e et de l'8e. Plus loin, les branches donnent encore trois renversements de chacun de ces accords. Les accords de 7e et de 9e sont dits « d'augmentation », ceux avec retard(s) sont appelés « de retardement » – la 7e elle-même n'est donc pas considérée comme un retard, ni la 9e accompagnée de la 7e.

L'arbre est présenté avec ut comme fondamentale et les autres notes diatoniques, de sorte que la 7e et la 9e sont majeures, mais le commentaire précise que, sur , l'accord parfait serait mineur, etc. Il faut en conclure que la dérivation à partir du « corps sonore harmonique » n'est qu'une concession conventionnelle à la tradition française.

Le corps du texte propose des distinctions plus nombreuses : « Les accords dissonnants sont ceux où l'on rencontre des intervalles ajoutés à ceux donnés par la résonnance du corps sonore harmonique, et qui par cette raison sont dissonnants : il en est de cinq espèces, savoir : dissonnants par augmentation, dissonnants par retardement, dissonnants par augmentation et retardement, dissonnants par suspension, et dissonnants par altération » (p. 25). Les accords d'augmentation « ne sont que l'augmentation de l'accord primitif, en suivant la progression de 3ce sur 3ce » (ibid.). Les appoggiatures et les « suspensions ou notes retardées » sont « nommées improprement accords par substitution » (p. 29). Ce qui est visé ici, ce sont apparemment des agrégations autres que celles données dans l'« arbre », engendrée notamment par des retards ascendants.

Les différents accords sont passés en revue; les degrés de la tonalité sur lesquels on peut les placer sont chaque fois indiqués. L'accord parfait peut être majeur, mineur, avec 5e diminuée ou avec 5e augmentée. Berton écrit que l'accord de 7e « varie de sept manières dans la proportion des intervalles dont il se compose » (p. 52), mais la liste qu'il en fait contient deux fois la 7e majeure (il voulait peut-être représenter dans l'un des deux cas la 7e majeure à 3e mineure). Outre les quatre accords d'espèces (cf. REICHA, 1816-1818), il cite la 7e diminuée et la 7e majeure à quinte augmentée. L'accord de 7e, dit-il encore sans préciser de quelle variété il parle, « donne le caractère de 5eme degré à la note sur laquelle on le fait entendre. Il s'emploie particulièrement sur le 5eme degré, souvent sur le 2d et le 7eme et sur tous les autres dans les suites d'harmonie, surtout lorsque le mouvement de la basse est de 4te en montant ou de 5te en descendant » (ibid.).

« Il doit paraître, sans doute, un peu téméraire d'oser attaquer le célèbre Rameau dans ses opinions musicales; mais malgré le respect que nous portons à ce célèbre compositeur, nous croyons avoir des arguments assez forts pour essayer de combattre l'erreur dans laquelle il tomba sur l'origine de son accord de 6te ajoutée, et qu'il a voulu classer, dans certains cas, parmi les accords fondamentaux, et dans d'autres parmi ceux de renversement, ce qui en fait véritablement un accord amphibie. Cette innovation nous paraît n'avoir aucun but d'utilité, en ce qu'elle contrarie le systême pris dans la nature, et dont on a fait sortir la règle si simple, qui dit, que le type de tous les accords, est celui donné par la résonnance du corps sonore harmonique; que le rapprochement de ces intervalles [12e et 17e] donne une 3ce et une 5te; que, pour rappeler son origine, on le nomme parfait; qu'en suivant la progression de 3ce sur 3ce on ajoute à sa 3ce et à sa 5te une autre 3ce en dessus de la 5te qui donne, par rapport au son fondamental, un intervalle de 7eme [...]; que dans [les] renversements, toutes les fois que deux sons se trouvent être près l'un de l'autre [Berton veut dire conjoints] [...], le plus bas des deux est la dissonnance [...]. L'on voit facilement que ce systême a plus d'unité et plus de clarté que celui de Rameau, qui veut que dans son accord de 6te et 5te, la 6te soit ajoutée et non la 5te, mais ce qu'il y a de plus embarrassant, c'est qu'il ne le veut pas toujours, car il l'emploie tour-à-tour comme accord fondamental et comme accord de renversement » (p. 76-77).

Berton détaille assez longuement les cadences et les modulations, mais cette description ne donne pas d'éléments déterminants pour la tonalité. Le traité contient aussi une phraséologie, ainsi que des données de contrepoint et d'écriture de la fugue.